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CHRONIQUES DE VOYAGE... 

Chronique de voyage n° 024 - Montevideo (Uruguay), le mercredi 10 avril
Chronique de voyage n° 025 - Montevideo (Uruguay),   le samedi 13 avril

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Chronique de voyage n° 024 - Montevideo (Uruguay), le mercredi 10 avril

Samedi 6 avril (Buenos Aires - Argentine, suite).

 Le dollar est à 2,75 pesos argentins et à Sao Paulo (Brésil), où je serai dans 10 jours, un nouveau jeu social est inauguré : des groupes armés s’emparent d’immeubles de luxe et fauchent tout ce qu’ils peuvent, occupant les lieux parfois pendant plusieurs heures. Cela fait plus de 30 fois depuis le début de l’année. Ici, à Matanzas, quartier populaire de Buenos Aires, il y a une manifestation pour fêter la libération d’un jeune « piquete », chômeur qui a participé à un barrage et a été arrêté. Il y a là aussi beaucoup de tchatche au micro de différents leaders qui se passent et repassent la parole.

 Je passe une partie de l’après-midi avec le couple Carrega (Zulema et Jorge) qui me font visiter en voiture le quartier de Palermo, notamment, magnifique de richesse, avec son parc, ses monuments, ses hôtels particuliers. Mes guides sont charmants et pleins de ressources sur la connaissance de cette ville. Ils me ramènent à l’hôtel après avoir pris un pot le long des docks aménagés.

 Dimanche 7 avril.

 J’avais prévu d’aller au quartier populaire de La Boca (où se trouve le fameux club de foot Boca Junior), le long de la mer, ancien quartier où débarquaient les immigrants italiens, quartier dangereux, me déclare le Ministère des Affaires Etrangères français ; puis je voulais aller au marché des Antiquaires de San Telmo. Je n’ai pas le temps, vu le courrier que j’ai sur mon mail. Je n’ai pas pris une fois le métro, ni un bus. J’ai tout fait à pied, sauf une fois un taxi. Je suis un peu à plat. Il fait 150% d’humidité, ce jour, et à l’hôtel, j’entends un américain qui renifle, avec le pif tout rouge ! Le pire, c’est qu’en montant vers le Brésil et Cayenne, ça ne va pas s’arranger.

 Gros titre de la presse : un policier assassiné tous les 2 jours et demi depuis le début de l’année. Ce n’est pas de la petite délinquance comme en France ! Et pourtant, les flics portent des gilets pare-balle, mais on les abat à bout portant dans la tête. La crise se manifeste aussi dans la sauvagerie.

 Je prends le buquebus pour Montevideo (Uruguay). 3 heures de voyage, 180 kms, 60 kms/heure. Derrière le bateau, 2 immenses gerbes d’eau, vu la vitesse du ferry. J’entends parler français, anglais, brésilien, allemand. Il y a aussi un groupe de juifs, avec la kippa, les lunettes à la Trotski, le large chapeau de feutre et la Thora dans les mains. Il y a une communauté importante à Buenos-aires. J’ai envie de leur dire deux mots au sujet de la survie du peuple palestinien, mais à quoi bon, et puis ils sont peut-être anti-Sharon et anti-sionistes… En tous cas, l’Ambassade d’Israël a été dynamitée ici, il y a dix ans : il n’en reste que des traces qui ont été transformées en monument du souvenir.

 Le port de Buenos-Aires est devenu un port de faible activité. Je repère une dizaine de cargos, porte-containers essentiellement. Les Porteños (nom donné aux habitants de B-A) n’ont plus de vraie vie portuaire, un peu comme à Bordeaux. D’autres villes ont pris la suite, pour cause d’éloignement de la ville au fond du Rio de la Plata qui s’envase de plus en plus, avec les alluvions venues des fleuves et coûtent très chers en travaux d’entretien et dragage. En passant au loin du port de La Plata, je vois une douzaine de cargos ancrés au large.

 La mer est toujours aussi rouge et il se met à pleuvoir. Je suis entouré par beaucoup de jeunes . Une jeune fille dort à mes pieds (eh oui !) en chien de fusil, jean et petit tee-shirt blanc, comme beaucoup de jeunes dans ce pays. Elles me paraissent jolies : mais est-ce objectif ou le fait que par l’éloignement de Mireille, j’ai tendance à les regarder avec plus d’attention ? Elles ont un type italo-espagnol-bronzé avec des profils fins et des yeux noirs qui me font penser à la tête de Brassempouy.

 Nous arrivons dans la nuit et sous la pluie à Montevideo. Le port me paraît important et la baie profonde, avec une ville située sur les collines en pente douce. Je suis dans un hôtel un peu vieillot, comme moi, mais situé dans le centre.

 Eh, les Ducalet et Descamps, tenez-vous bien : concert de Clapton à la télé, il y a 12 ans, à Buenos-Aires. Ah, Cocaïne !!! Mais je n’ai pas TV5, je serai privé d’infos.

 L’Uruguay. Ce petit pays a une histoire originale. Après l’élection à la présidence de la République d’un dénommé José Battle (dont le petit fils est président aujourd’hui), en 1903, il y eut légalisation du divorce, abolition de la peine de mort, journée de travail de 8 heures, nationalisation des banques et des principales industries. Ca s’est gâté par la suite avec des coups d’Etat militaires, le dernier en 1973 pour 12 ans avec 80.000 arrestations, dont les célèbres Tupamaros (du nom de Tupac Amaru, grand résistant au colon espagnol). 3,1 millions d’habitants, dont 40% à Montevideo.

 Attentat à Bogota : une première explosion a attiré du monde et une seconde est arrivée, avec 12 morts et plus de 100 blessés ; le tout attribué aux Farc et donc, concert de casseroles de protestation à Bogota.

 Au Vénézuela, Chaves a décidé une augmentation des salaires de base de 20%, alors qu’une grève est prévue mardi. Il a en outre viré des dirigeants d’entreprises du pétrole en les nommant à la télé et en ajoutant pour chacun : « Afuera ». Elégant !

 Elections au Costa-Rica avec plus de 50% d’abstentions, le taux le plus fort jamais vu.

 Lundi 8 avril.

 La presse annonce un niveau de 45% d’inflation en Argentine pour 2002.

 Ici, il fait beau et je vois peu à peu que la vie est plus chère, de 10 à 15%, qu’en Argentine. En bas de l’hôtel, sur la place, je vois une SDF qui doit vivre dans ce jardin public. Elle a de nombreux sacs plastiques sous le banc qu’elle a accaparé et où elle doit dormir. Derrière les poches, les cartons qui servent de lit sont bien alignés. Je fais mes différentes démarches : 3 heures à pied sous le soleil. J’ai donc visité le centre et le vieux quartier, entre port et côte, à l’Ouest de la ville. Il y a une place immense avec de beaux immeubles (quelques-uns du 19ème siècle, la plupart du début du 20ème), mais encadrés par des buildings sans style. En me promenant, je repère une affichette : « Les banques étrangères ne font appel à l’Uruguay que pour blanchir leur argent sale ». On dit partout dans le monde que l’Uruguay, c’est la Suisse de l’Amérique Latine, pour ses vertes prairies, par exemple. Mais aussi pour ses banques qui, selon certains argentins, jouent des rôles aussi douteux, financièrement, que les banques suisses. Je vois aussi des banderoles d’enseignants en lutte et d’autres à propos des disparus pendant la dictature militaire. Je découvre le café où Carlos Gardel (d’origine uruguayenne) a créé dans les années 20 « La Cumparsita », « que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître », comme le chante Aznavour. J’admire enfin de vaillants petits chevaux tirant des carrioles chargées de matériaux de récupération, essentiellement de carton, triés par ces ouvriers de la rue et de la crise. On entend le cliquetis rapide des sabots sur le bitume au moment et après le coucher du soleil. Cela fait partie des petits boulots, comme celui des nombreux distributeurs de prospectus dont la ville est jonchée le soir.

 A la télé, je vois en direct en Argentine une manif qui envahit l’aéroport, puis le Sheraton, pour protester contre la présence du FMI et une autre dans une banque d’un groupe de personnes qui veulent récupérer leurs dépôts. Bagarre avec la police et arrestation d’une femme, ivre de colère. Les flics se font traiter de « maricones » par les clients. Ailleurs, une autoroute est coupée et une manifestation se produit de nuit pour huer un ancien ministre mis en prison (j’en profite pour corriger une erreur précédente : l’ex-président qui est menacé de poursuites pour contrebande d’armes est Menem, le président risquant, lui, des poursuites pour les 5 morts lors de la répression de la manifestation de décembre à Buenos-Aires).

 Mardi 9.

 Temps couvert, entre 20 et 24°. A la télé, beaucoup de pubs pour les cliniques, les médecins, les médicaments et les médications les plus douteuses, et les système de santé, privés, bien sûr ! Annonce de 10.000 licenciements dans les banques argentines, pour cette année. Plus de 700 étrangers attaqués à Mexico par des bandes de jeunes délinquants autour des hôtels, des aéroports, des gares. 12% des américains, puis 10% des français. Ce jour, grève générale de 24h des chefs d’entreprise et de syndicats contre la politique de Chavès au Vénézuela. A Montevideo aussi, chute des réserves monétaires de la banque centrale, par retrait des dépôts (surtout en janvier-février) et le dollar augmente.

 Et la belle Maria Félix qui est morte ! Ah, « Les orgueilleux » et « Les héros sont fatigués » ! J’avais 15 ans et les moiteurs de l’Afrique n’avaient d’égales que les miennes !

 Je rencontre pendant une heure et demie le responsable du Centre de Promotion et de Recherche sur le Temps Libre et la Récréation (le mot n’a pas le même sens ici qu’en France). Puis je mange au Marché Central de la ville. Je descends vers la mer, toujours aussi marron. Ce côté nord de Montevideo est sans plage, la mer frappant la digue ; une route à 6 voies la sépare de bâtiments style HLM, assez moches, qui sont à moins de 100 mètres d’une usine à gaz qui me paraît assez ancienne et serait classée Seveso en France. Cette entreprise appartient à des intérêts français, m’a-t-on dit. Beaucoup de détritus dans l’eau : serait-ce comme en Espagne, les décharges le long des falaises ? Le temps se couvre, il bruine. Je vais à l’Ambassade de France, où je rencontre l’attaché de coopération scientifique et technique, qui me donne des adresses de personnes intéressantes à voir.

 Le soir, je rencontre une partie de l’équipe de Fabian Vilas et nous refaisons le monde dans un bistrot de légende de la ville, avec quelques pichets de vin.

 Et en Argentine, ça continue : occupation par les piqueteros à Tucuman de la Place de l’Indépendance, avec camping, grillades, pique-nique. Et grève des cheminots argentins à partir de minuit. Manifestation des fonctionnaires devant le Ministère de l’Economie argentin.

 A Montevideo, grève générale dans quelques jours contre le chômage (14,4%) et la hausse des prix.

 Mercredi 10 avril.

 El Pais local annonce en première page, avec un gros titre sur 6 colonnes, la montée de la délinquance des jeunes, avec 2 autres pages intérieures sur le même thème.

 Hier, barrages de routes en Uruguay à l’initiative des syndicats. Conflit entre ce pays et Cuba au sujet de paroles blessantes qui auraient été prononcées par Fidel vis-à-vis de l’Uruguay. Tout cela sent la magouille américaine, car il ne faut pas oublier la motion contre Cuba à l’ONU. L’Uruguay a rappelé son ambassadeur et le Sénat a voté une motion de censure contre Cuba ! Et pendant ce temps, la grève se poursuit au Vénézuela contre Chavès en particulier, dans le secteur pétrolier qui représente 40% de la richesse de Caracas. Tout cela n’est pas net, car Chavès déclare que le pays fonctionne normalement. A Bogota, un camion bourré de dynamite a explosé lorsque des policiers ont voulu sortir un cadavre du véhicule ; malheureusement, il était piégé. Enfin,à la télé, je vois un reportage sur Manu Chao et juste après, un clip publicitaire sur la Défense des Droits de l’Homme. C’est Manu qui serait content de le savoir ! Je subodore une campagne idéologique de grande ampleur en Amérique latine de la part de gringos yankees pour préparer l’opinion à la condamnation de Cuba.

 Derrière moi, pendant le petit déjeuner, 2 personnes âgées, 2 femmes bien parcheminées, discutent de la victoire de Penarol, qu’elles ont regardé à la télé hier soir. Elles savent tout des résultats et des classements. Voila le lien social intégrateur de l’Amérique Latine, avec le combat contre la pauvreté, beaucoup plus que la religion catholique !

 Je remercie pour leurs messages : Jean-Pierre Augustin, Pierre Pommier, Cécile Niort, Solange Gayoso au Brésil, Caterine Reginensi au Brésil, Cleisa à Sao Paulo, Marcela Rodriguez à Montevideo, Christine Van Elsuwe, et bien sûr, Jean-Pierre  et Delphine Descamps.

Pensée du jour : « Le succès va d’échec en échec sans que nous perdions notre enthousiasme ». Winston Churchill.

 

vers Chronique de voyage n° 025 - Montevideo (Uruguay), le samedi 13 avril

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